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Rencontre avec Leila Hatami – 2014

RENCONTRE – Leila Hatami : « Quand il fait des films sans artifices, l’acteur a moins le droit à l’erreur »

Révélation d’Une séparation d’Asghar Farhadi en 2011, Leila Hatami est l’une des neuf membres du Jury de cette édition du Festival de Cannes. Interview avec une actrice gracieuse, merveilleuse ambassadrice de l’Iran.

Vous êtes une enfant du cinéma, votre père était réalisateur et vous avez tourné dans ses films, votre mère est actrice et vous apparaissez dans le premier film de votre mari, acteur du Passé. Est-ce important pour vous de tourner en famille ? 

Ma famille a beaucoup influé sur mon amour du cinéma. Malheureusement, j’ai commencé ma carrière d’actrice professionnelle quand mon père est décédé. J’aimais beaucoup son cinéma, ses films en costumes. Travailler avec mon mari s’est révélé très familial car on n’avait pas beaucoup de financements. Mon mari a donc réalisé deux films dans une ambiance très familiale, avec ma mère, ma belle-mère, moi à la direction artistique et aux décors. Mais ça n’est pas spécialement une préférence pour moi de tourner en famille. D’ailleurs, de manière générale, je n’aime pas trop travailler avec une équipe spécifique, avec tel réalisateur, tel scénariste… Je choisis mes films en étudiant le scénario, en examinant le rôle. Même si c’est une équipe que j’adore, si le rôle ne me convient pas, je n’irai pas. 

Vous parlez très bien le français, vous avez étudié la littérature française. Aimeriez-vous voir l’adaptation au cinéma de l’un des romans que vous aimez ? 

Oui, ce serait un challenge. Les livres sont en général beaucoup mieux écrits que les films et ils deviennent souvent beaucoup moins beaux quand c’est quelqu’un qui les incarne. Donc ce serait vraiment un défi pour moi de me lancer là-dedans. Mon père par exemple s’inspirait de la vie de personnages connus. D’une certaine manière, il faisait des adaptations même si ça n’était pas de la littérature. 

Quelle est la particularité d’être une actrice iranienne aujourd’hui ?

En fait ce sont les conditions de tournage qui sont différentes, le travail est plus difficile pour les actrices en ce sens qu’il est limité esthétiquement. Au niveau de l’image, ça manque d’une certaine liberté esthétique et artistique et en ce qui concerne le jeu, comme on est un peu démunis d’accessoires pour le rendre plus crédible, on fait plus appel à notre expression, à notre corps. Quand on fait les films dans un décor très simple, la caméra est fixée sur l’acteur. Ça revient à comparer le dessin et la peinture. Le dessin, ce sont des traits et on peut facilement se laisser impressionner par la prise et par la force du crayon, tout est évident, alors qu’avec la peinture on arrive à mieux cacher son incompétence. Pour moi c’est ça. 

Vous avez un profil international, vous parlez aussi l’allemand et l’anglais, en plus du persan, Téhéran est-elle une ville à votre image, internationale ? 

Ce n’est pas une ville multiculturelle mais les gens sont très ouverts au monde, ils suivent vraiment l’actualité, en art et en mode surtout ! Tous ceux qui ont une profession ont internet, ils n’ont pas un esprit fermé, ils veulent voir ce qui se passe ailleurs, ils ont cette curiosité de connaitre, une curiosité que je n’ai pas d’ailleurs!  

Quel est votre prochain projet professionnel ?

Je viens juste de terminer un film de Safi Yazdanian qui s’appelle Quelle heure est-il dans ton monde avec Ali Mosaffa, qui est aussi producteur du projet. C’est un très beau film. D’une certaine manière il y a une liaison entre la France et l’Iran et c’est une histoire d’amour très particulière et très touchante.

C’est important pour vous de faire le lien entre la France et l’Iran ? 

Non pas spécialement. Mon rapport avec la France est lié à mon enfance car ma mère m’a mise toute petite à l’école française. Puis il y a eu la Révolution et cette école a fermé donc je suis restée dans l’imperfection du français. J’ai toujours été perfectionniste dans l’apprentissage de cette langue et je ne me suis jamais satisfaite de mon niveau, avec cette coupure à 7 ans dans mon apprentissage. 

Quelle cinéphile êtes-vous ?

C’est toujours très délicat de répondre à cette question alors je vais prendre des exemples. Quand on nous demande quels sont les plus beaux jours de votre vie on n’arrive pas à le dire tout de suite, on va parler du mariage, des enfants… Mais il y a tellement de jours où on était peut-être encore plus heureux. Donc pour vous donner une idée, je suis très fan de Truffaut, je l’aime vraiment beaucoup, j’ai vu toutes ses œuvres. Mais j’aime aussi beaucoup Tarantino, Haneke, Woody Allen, Mr. Kiarostami dont je suis également très fan, ou Polanski.

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